Avant, il y a longtemps, je croyais pouvoir brûler le temps, voyager dans le moment présent, sans me souvenir. Pourtant, dans ma mémoire, je dévore le livre de mon histoire, qui m’enchaîne et me permet de voir dans mon avenir.
Le temps ne veut rien savoir, il donne l’espoir et puis il le détruit.
C'était il y a environ 10 ans pour moi.
Et encore 10 plus tôt (donc il y a 20 ans pour ceux qui suivent), je découvrais ce qui sera ma passion toute ma vie, la moto.
J'ai 6 ans, je vais au CP, je me débrouille bien à l'école, mais sur les carnets de classe, la maîtresse note constamment : Eléve agité et ne tenant pas en place. Heureusement que les résultats sont là.
Mes parents se posent des questions. On va en faire quoi de ce paquet de dynamite ambulant ??
Allez hop, tout le monde au centre aéré et vogue la galère.
Et là, c'est la révélation, on me pose le cul sur une Yamaha PW 50 (Prononcez "Piwi"). Oh bien sûr ce n'est pas une ZX12R, mais moi, tout minot, ça m'éclate.
Arrive ce qui devait arriver, je tanne mes parents pour en avoir une. Et j'obtiens gain de cause à Noël, sous couvert de résultats scolaires au top. Soit. Je m'y plierai.
Fier comme un Artaban, me voila parcourant les bords de Loire avec mon dragster.
Mais bien vite je tourne en rond. D'ailleurs, ça se voit sur le sable.
Et puis très vite, il faut que je passe à la vitesse supérieure. De courses en courses, de terrains en terrains, ma passion pour ce sport grandie, tout comme moi.
On s’éclate le dimanche après-midi, tranquillement.
Puis, à 16 ans, c’est le drame. A mon échelle, certes, mais c’est le big bang, le trou noir, la matière qui s’écroule sur elle-même.
Le médecin est catégorique, c’est fini. Un an de rééducation, c’est long, ça coupe tout. Mais il faut en passer par là si un jour je veux courir et faire du vélo de nouveau.
Quand depuis qu’on est enfant, on s’accroche à un rêve, pour aller de l’avant. Et qu’un matin il s’achève, balayé par le vent. Qui peut avancer l’esprit libre, oublier jusqu’à son corps, quand piquent les yeux de plus en plus fort, qui peut tenir en équilibre dans un monde où l’on s’endort chaque nuit un peu plus fragile encore ?
Dans cette course au temps perdu, ma passion n’est pas morte. Tel un feu, elle brûle en moi, me taraude et me rappelle quand je ne vais pas bien.
Novembre 2000, c’est décidé, je l’aurai ce foutu permis ! Je m’inscris donc.
Première leçon de plateau, commentaire du moniteur à mon égard :
« Ecoute, heu, la position MotoCross sur la moto, c’est bien, mais ça passera jamais à l’examen ! »
Heu, d’accord m’sieur. Po ma faute.
Bref, 4 heures de plateau et 1 de circulation plus tard, j’obtiens l’examen, le sésame pour une vie meilleure.
Mais que vais-je prendre comme machine ? Un 600 ? Bof, trop petit et pas assez de gnac, je vais rapidement me faire chier.
Un B12 ? Bah, on en voit partout.
Et le 1000 Fazer ? Ah ouai tiens. Il est beau en noir. Je vais partir là-dessus.
Un vrai bonheur cette moto.
30000 Km et 1 an ½ plus tard, je le revends. Les larmes aux yeux. Surtout quand tout le monde te dit « Bah, pourquoi tu le vends ? Il est trop beau ton 1000 Fazer… » Arrrggghhh, snif….
Puis, 5 mois plus tard, vient ça remplaçante. J’en avais toujours rêvé. Un missile sol-sol dit on. Un truc de fou qui te colle les yeux au fond du casque, un bâton de dynamite à ne pas mettre entre toutes les mains.
Nafoute, j’en aurai une, mais pas en vert par contre…Ne jamais dire jamais :
Malheureusement, 4 mois plus tard, me voila en train de glisser sur le bitume de Quimperlé. Et la Grenouille de faire deux bisous fougueux au rail de sécurité.
Fin d’une histoire d’amour, dans la tristesse et la souffrance.
Pendant pratiquement 1 an et grâce à Sushi, je continuerai à vivre ma passion, grâce au prêt de son Fazer 600 :
Le 10 Juin 2005, j’ai 27 ans et voila qu’on me donne les clefs d’un vibromasseur italien. Un 1000 en plus, rouge comme les voitures au cheval cabré.
C’est une première, je n’ai jamais piloté un tel engin, avec seulement deux poumons au lieu de 4 :
Ca fait maintenant 4 mois et 14000 Km qu’elle m’accompagne dans pratiquement tous mes déplacements. Et même si elle me donne du fil à retordre, j’avoue qu’elle est attachante.
Aujourd’hui, je suis loin de chez moi, loin des miens, loin des mes attentes. Mes démons dorment au fond de moi et j’attends que ça morde, tirer la corde, pour me retrouver.
La liberté qu’on arrache est le pire des maux et j’en ai marre de regarder la vie derrière des barreaux.
Merci de m’avoir lu.
P.S. : Désolé pour la qualité de certaines photos, mais faire des photos de photos quand on a pas de scanner, ce n'est pas évident.